Numéro spécial, hommage au professeur Louis Massé
ÉPIDÉMIOLOGIE ANIMALE ET PROTECTION DE LA SANTÉ PUBLIQUE
Toma (B)
Massé (L)
Mérieux (C)
Après avoir évoqué les raisons motivant l'existence du système international de déclaration des maladies animales de l'Office international des épizooties (OIE), l'auteur expose les modalités de fonctionnement de ce système et les moyens de diffusion de l'information qu'il permet d'obtenir, puis indique les pistes qui sont suivies par l'OIE dans les domaines de l'informatique et des télécommunications pour faciliter l'accès à cette information.
Après quelques notions générales rappelant les définitions, les objectifs et les principes d'une classification des réseaux d'épidémiosurveillance animale, les principaux réseaux d'épidémiosurveillance animale utiles en santé publique (concernant donc des zoonoses et de l'hygiène alimentaire) sont présentés dans leurs grandes caractéristiques (aire géographique couverte, échantillonnage ou non, mode actif ou passif de récolte des données et aspect "autonome" ou "intégré" de leur financement). Pour chacun d'eux, un schéma de fonctionnement est présenté.
Le Réseau national de santé publique (RNSP) a pour mission générale de coordonner et de renforcer les activités d'épidémiologie d'intervention en France : investigation d'épidémies, surveillance, évaluation, formation et recherche appliquée dans les domaines des maladies transmissibles et des pathologies liées à l'environnement. A partir du noyau central de Saint-Maurice et de ses cellules (inter) régionales d'épidémiologie, des réseaux de collaboration, continue ou ponctuelle, sont développés avec des institutions ou professionnels concernés par des thèmes de santé publique. Le RNSP est constitué de trois unités : l'Unité des maladies infectieuses, l'Unité santé-environnement et l'Unité des systèmes d'information. Cette communication présente les missions du RNSP, son architecture et ses actions.
À l'ère des technologies de l'information, plusieurs outils informatiques, statistiques et de communication ont vu le jour dans différents domaines, tant en santé animale que dans d'autres champs d'intérêt. L'épidémiosurveillance n'y fait pas exception. Ainsi, des applications de systèmes de gestion de l'information ont été développées pour promouvoir et faciliter le fonctionnement efficace des réseaux d'epidémiosurveillance. Ces systèmes informatiques peuvent être utilisés à des fins diverses telles que la récolte de l'information, l'analyse et le traitement de l'information ainsi que la diffusion de l'information. Le présent article présente un système d'information géographique mis au point par le Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec et utilisé dans son Réseau d'Alerte et d'Information Zoo-Sanitaire (RAIZO), ainsi que différentes applications de ce système.
L'épidémiosurveillance au Canada doit se développer tout en faisant face à plusieurs contraintes économiques, politiques, de ressources humaines, socio-culturelles , technologiques et de transfert d'information. C'est dans ce cadre que le Ministère Fédéral de l'Agriculture et de l'Agro-Alimentaire propose une association entre les gouvernements fédéral et provinciaux, les industries animales et les universités. Le but est de créer un réseau d'épidémiosurveillance répondant aux besoins dictés par les ententes du GATT et de l'Accord de Libre Échange Nord-Américain.
Les épidémies de listériose qui ont frappé la France depuis quelques années ont mis en avant la réalité d'un risque alimentaire. Les données épidémiologiques dont nous disposons montrent que le risque zéro n'existe pas, mais que des pistes d'exploration s'offrent à l'investigation de l'ensemble des partenaires concernés par cette problématique : prévention de la listériose à travers la communication et la gestion du risque et des crises lorsqu'elles apparaissent.
A la suite de l'éclosion d'un épisode de fièvre Q dans la région de la Mauricie au Québec, une étude de séroprévalence a été menée afin d'identifier les vecteurs potentiels de cette zoonose. Les résultats indiquent que 23,3 % et 32,1 % des chats de deux secteurs de la Mauricie ont réagi à une épreuve d'immunofluorescence indirecte alors que l'épreuve de fixation du complément chez les mêmes animaux montrait une séropositivité de 16,9 % et 17,9 % respectivement. Cette étude met en lumière l'importance potentielle du chat domestique dans l'épidémiologie de la coxiellose en Mauricie.
Les infections à Escherichia coli producteurs de vérotoxines (VTEC) apparaissent depuis une dizaine d'années comme un nouveau problème de santé publique en Amérique du Nord et en Europe. Les manifestations cliniques des infections à VTEC sont variées : diarrhée banale, colite hémorragique, syndrome hémolytique et urémique (SHU). Le SHU est la principale cause d'insuffisance rénale aiguë chez l'enfant et son incidence chez les enfants de moins de 15 ans varie de 1 à 2/100 000 habitants selon les pays. Une transmission par l'alimentation d'origine bovine a été reconnue à l'origine de la plupart des épidémies dues à cette bactérie dont le sérotype dominant est O 157:H7. Mais des transmissions d'origine hydrique, animale ou interhumaines ont été décrites. La situation en France est mal connue mais plusieurs épidémies de SHU ont été signalées récemment. Une étude, associant le Réseau national de santé publique, la Société de néphrologie pédiatrique, l'Institut Pasteur et le Laboratoire de microbiologie de l'hôpital Robert Debré, est actuellement en cours. Cette étude permettra d'estimer l'incidence des SHU, de préciser les agents bactériologiques responsables et d'étudier les cas groupés afin d'identifier les véhicules alimentaires.
Les salmonelloses d'origine animale ont connu, au cours de ces dernières années, un regain d'actualité, en raison de différents événements ; parmi ceux-ci, on peut citer entre autres : L'apparition du phénomène "Salmonella enteritidis" chez les volailles ; La recrudescence des cas de salmonella bovine, mais aussi la prise en compte, de plus en plus importante par les consommateurs, des problèmes de sécurité des aliments. Différents points sont envisagés successivement : L'incidence du portage ou des salmonelloses cliniques dans différentes espèces animales ; L'influence des modes d'élevage et des différents stades de la production sur la contamination finale des produits. Les moyens de maitrise sont évoqués, l'accent est mis en particulier sur l'importance de la chaine du froid. Cependant, malgré les efforts accomplis, la notion du "risque admissible" doit être considérée. L'information des consommateurs doit constituer un sujet prioritaire de préoccupation.
La maladie des griffes du chat (MGC) fut décrite cliniquement en France en 1950, mais son étiologie n'a été clairement identifiée que récemment. Une nouvelle bartonelle, Bartonella henselae, agent de l'angiomatose bacillaire, maladie vasculo-proliférative sévissant principalement chez les sujets infectés par le virus VIH, agent du SIDA, a été incriminée comme agent de la maladie des griffes du chat sur des critères épidémiologiques, sérologiques, bactériologiques et de biologie moléculaire. Le chat domestique représente le réservoir de l'agent infectieux. Les chats sont porteurs sains et peuvent être bactériémiques pendant des mois, voire des années, sans aucune expression clinique de leur infection. L'infection se transmet de chat à chat essentiellement par l'intermédiaire des puces, comme nous l'avons récemment démontré. Les connaissances actuelles concernant l'étiologie, les manifestations cliniques et l'épidémiologie de la maladie des griffes du chat et de l'angiomatose bacillaire sont présentées.
Au Québec, les différents types de milieux naturels recèlent une multitude d'habitats fauniques divers. Un réseau de parcs a été créé afin de préserver et mettre en valeur des éléments du patrimoine naturel québécois et de les rendre accessibles au public. Dans les zones fortement urbanisées sous la pression humaine, des parcs ont aussi été créés afin de protéger des habitats. Les écosystèmes dits naturels sont de plus en plus visités par des touristes orientés vers l'écologie. Dans les territoires fortement urbanisés, la présence de la faune peut représenter la dernière opportunité de contact avec la nature. Les autorités de la santé publique sont entre autres concernées par des zoonoses caractérisées d'émergentes, telles les infections à hantavirus et la rage du raton laveur (Procyon lotor). Les données écologiques et épidémiologiques sur les zoonoses fauniques sont souvent incomplètes pour faire des analyses de risque. Il existe un besoin d'optimiser les cueillettes de données sur les animaux de la faune et d'archiver des tissus afin de mieux comprendre l'évolution des zoonoses dans le temps et l'espace, et être capable de prédire des épisodes. La concertation interdisciplinaire s'impose, tout en étant à l'écoute des préoccupations et idées des communautés concernées. La gestion du risque doit se faire dans le contexte de la conservation des espèces fauniques, leur habitat et le respect de l'humain.
Exceptionnelle en France avant 1975, la trichinellose y est devenue un problème de santé publique : six épidémies, ayant totalisé plus de 1700 cas entre 1975 et 1995, ont été provoquées par la consommation de viande de cheval, ingérée crue ou peu cuite. Les carcasses avaient été importées soit d'Europe centrale, soit d'Amérique du Nord, où la trichinellose sauvage est enzootique. Le mode de contamination des chevaux reste inconnu. En 1985, une réglementation internationale a imposé un contrôle parasitologique de toutes les carcasses de chevaux. Ces contrôles n'ont pas empêché la survenue d'épisodes ultérieurs et la vigilance doit être maintenue, en améliorant la précocité de l'alerte, la qualité du contrôle des épidémies et la prévention.
La trichinellose est une des zoonoses parasitaires les plus répandues dans le monde, sous toutes les latitudes, chez près de cent cinquante espèces de mammifères ainsi que chez les oiseaux. Actuellement, huit populations de Trichinella sont reconnues, réparties en cinq espèces. La transmission du parasite d'un animal à un autre s'effectue par ingestion de viande contenant des larves de trichine. Les prédateurs et les carnivores charognards ont un rôle principal dans la faune sauvage. Le porc et le rat contribuent à la pérennité du cycle domestique. Les herbivores, en particulier le cheval, ont été trouvés infestés. La distribution du parasite est décrite dans les cinq continents.
Le REMI, réseau de surveillance microbiologique du littoral français, est brièvement décrit. Il comprend un réseau de 415 stations de prélèvement réparties sur l'ensemble des zones conchylicoles (élevages et gisements naturels) du littoral français. L'évolution récente de la réglementation européenne et française conduit au classement des zones de production en quatre catégories par groupes de coquillages et à l'accroissement de l'effort de surveillance actuel. Le classement de la zone d'origine des coquillages détermine leur destination avant leur mise sur le marché (expédition directe ou purification). Le classement d'une zone est modifié en fonction de l'évolution de la pollution bactériologique.
Le CNEVA Lyon, Laboratoire de Pathologie Bovine, anime un réseau national de surveillance de l'antibiorésistance basé sur une quarantaine de laboratoires départementaux de diagnostic vétérinaire. Ces laboratoires ont recours à des méthodes hautement standardisées. Ce réseau permet de recueillir des données sur l'antibiorésistance des souches pathogènes isolées en médecine vétérinaire et de collecter des souches utilisées pour étudier les mécanismes de résistance aux antibiotiques. Ce réseau pourrait être connecté à d'autres systèmes de surveillance compatibles, développés en médecine humaine ou dans les domaines de l'agro-alimentaire et de l'environnement, pour évaluer l'importance pour la santé publique de la résistance et de la diffusion des facteurs de résistance.
Les données récentes de l'épidémiologie de la rage en France et en Europe sont présentées et replacées dans leur contexte historique. La mise au point de la vaccination orale du renard contre la rage a permis d'obtenir une diminution très significative de son incidence, ou son élimination de grands territoires. Celle-ci n'empêche cependant pas les réinfections et son efficacité est remise en cause localement par l'augmentation des populations de renard.
Parallèlement à la surveillance des salmonelles à partir des déclarations obligatoires des toxi-infections alimentaires collectives, le Centre national de Référence des entérobactéries de l'Institut Pasteur effectue une surveillance de salmonelles à partir des souches adressées par les laboratoires d'analyses de biologie médicale. Toute augmentation anormale d'une souche est signalée à la Direction générale de la santé et au Réseau national de santé publique qui conduit aussitôt une enquête exploratoire pour déterminer s'il s'agit d'un phénomène épidémique avec possibilité de source commune. Si c'est le cas, une enquête cas/témoins est conduite pour en préciser l'origine. Ces enquêtes nécessitent une étroite collaboration avec les laboratoires du Centre national d'études vétérinaires et alimentaires qui surveillent les salmonelles dans les filières animales, l'environnement et les aliments, ainsi qu'avec la Direction générale de l'alimentation pour les investigations alimentaires.
Les zoonoses représentent un groupe hétérogène de maladies infectieuses fréquemment sous estimées. Le médecin clinicien doit savoir les soupçonner, les identifier et les traiter de manière adéquate. L'expertise de nombreux intervenants peut être nécessaire. Les infections zoonotiques en émergence doivent être également considérées
Les moyens de contrôle couramment utilisés dans les abattoirs sous inspection fédérale sont brièvement décrits. De nouveaux outils d'inspection sont en voie de développement. L'approche HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), couvrant toutes les étapes de la transformation des animaux en produits de viande à l'abattoir, permet de mieux contrôler les dangers microbiens, physiques ou chimiques liés à la production des aliments. En ce qui concerne le contrôle des zoonoses proprement dites, l'inspection organoleptique des carcasses (inspection post-mortem) demeure l'outil de prédilection. Cette dernière pourrait toutefois subir de profonds changements au Canada. Parmi ces changements anticipés, on compte l'utilisation des méthodes statistiques du contrôle des processus et l'analyse des risques appliquée à des conditions pathologiques.
Les résidus de contaminants chimiques apparaissant dans les aliments ne suscitent plus autant d'intérêt dans le domaine de la santé publique, mais sont par contre importants en ce qui concerne le commerce international et la confiance des consommateurs. Les types de résidus soulevant le plus de litiges et apparaissant dans la viande, le lait et les œufs sont les antibactériens, les promoteurs de croissance hormonale et certains pesticides, métaux lourds et composés chimiques industriels.
La relation Homme-animal présente des avantages et des risques. Les modifications des sociétés humaines pendant le présent siècle amènent à reconsidérer l'impact de cette relation sur la santé publique. L'objectif de la présentation est de faire ressortir l'aspect positif de la relation Homme-animal et le rôle du vétérinaire pour maintenir et améliorer la santé des personnes, ce qui est différent du rôle préventif associé aux zoonoses. La santé publique vétérinaire est très peu développée et un mode de communication et de concertation doit être trouvé car la profession vétérinaire a un rôle important à jouer.
Le sujet essentiel de cette conférence correspond aux aspects de santé publique des contacts Homme-animal. En se concentrant sur les maladies alimentaires et les zoonoses, il est facile de perdre de vue les nombreux aspects nettement plus positifs de nos relations avec les animaux. Cet article va présenter rapidement les multiples façons par lesquelles la vie, la culture et la santé humaines s'enrichissent grâce aux relations avec les animaux, tout particulièrement les animaux de compagnie. Des exemples des domaines contemporains de la recherche sur les interactions Homme-animal seront mis en avant.
Cet article fait le point sur deux aspects d'actualité de la relation Homme-animal : d'une part, la place des animaux dans les médias (presse écrite et télévisuelle), avec la montée en puissance des animaux de compagnie depuis les années 70, qui a rendu obsolète la présence des animaux de rente et de la faune sauvage ; d'autre part, au regard de nos expériences de terrain, les relations entre les jeunes enfants et leurs chiens, en fonction des comportements particuliers développés par les enfants âgés de 1 à 6 ans.