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Toma (B)
 
RÉUNION DU 25 OCTOBRE 1984. ÉPIDÉMIOLOGIE et PRÉVENTION de la SALMONELLOSE BOVINE
 
Corbion (B)
De 1976 à 1983, 5 642 souches de salmonelles d'origine bovine ont été étudiées au Laboratoire Central d'Hygiène Alimentaire. Elles correspondaient à 63 sérotypes au sein desquels S. dublin et S. typhimurium occupent une place prépondérante (88 p. cent des souches). S. dublin est isolée surtout lors d'avortements et S. typhimurium prédomine dans la pathologie néo-natale. De nombreuses souches isolées possèdent un haut niveau de résistance aux antibiotiques. La distribution de ces souches dans le temps et dans l’espace est analysée.
 
Pohl (P) & Lintermans (P)
De 1960 à 1984, quatre types de salmonelles enzootiques ont été observés chez les bovins en Belgique. D'abord des souches de S. typhimurium intypables par les phages de lysotypie et peu résistantes aux antibiotiques (1960 à 1970), puis elles ont fait place à des souches de S. typhimurium de lysotype 207 résistantes à Su STCKA (de 1970 à 1977), qui elles-mêmes ont été remplacées à partir de 1978 par des souches de même sérotype appartenant au groupe phagique 49-193-204 et résistantes à Su STCKA Tp. De plus, sont apparues à partir de 1971 des souches de S. dublin de biotype 1 résistantes à Su STC, puis à Su STCKA (en 1974) et enfin à Su STCKA Tp (1984). Ces salmonelles multi-résistantes qui ont colonisé les bovins s’observent également chez d’autres mammifères et chez l’Homme, mais en très petit nombre.
 
Gledel (J)
La fréquence non négligeable avec laquelle des salmonelles sont mises en évidence dans les différentes composantes de l'environnement, qu'il s'agisse des milieux extérieurs (sol, eaux, végétaux) ou des vecteurs animés, animaux sauvages (rongeurs, oiseaux, insectes, etc...) et animaux domestiques, conduit à s'interroger sur l'existence d'un lien épidémiologique entre leur contamination et l'apparition d'épisodes de salmonellose chez les animaux d'élevage et notamment les bovins. L'étude bibliographique réalisée confirme la présence et la possibilité de survie des salmonelles dans l'environnement. Une attention particulière est portée, de ce point de vue, aux boues d'origine urbaine et aux lisiers, en tant que maillons importants des cycles contaminants. Cependant, il reste souvent difficile, en l'absence de marqueurs spécifiques non discutables, de démontrer des relations directes de cause à effet entre la contamination de l'environnement et la pathologie bovine. Salmonella dublin constitue, à cet égard, une sorte d'énigme. Dans l'état actuel de nos connaissances, il sera toujours très délicat de déterminer qui, de l'environnement ou de l'animal, est l'initiateur de la contamination. C'est pourquoi il reste indispensable de poursuivre l'étude détaillée des souches isolées en pathologie bovine, mais également et surtout, de celles qui seront trouvées dans l'environnement au cours des enquêtes épidémiologiques précises qui doivent être menées de façon systématique lors d'apparition de cas de salmonellose chez les bovins, afin de tenter d'obtenir des précisions sur leurs cheminements exacts.
 
Martel (J-L)
Chez les bovins, les salmonelloses cliniques se manifestent de façon relativement fréquente, par rapport à d'autres espèces animales, entraînant ainsi des problèmes économiques particulièrement sévères dans les élevages intensifs de veaux, qui s'ajoutent aux préoccupations des hygiénistes. Les principaux éléments du cycle épidémiologique concernant les bovins sont envisagés pour les deux principaux sérotypes, S. dublin et S. typhimurium, rencontrés chez cette espèce animale. La source essentielle de contamination des bovins est constituée par l'espèce bovine elle-même. On reconnait trois types de relations entre le germe et son hôte selon le sérotype et l'âge des animaux, ce qui permet de distinguer le portage passif, le portage latent et le portage actif déterminant le niveau, la durée et le rythme de l'excrétion fécale. Parmi les autres voies d'excrétion, la voie placentaire (et vaginale) se révèle importante à considérer en raison du haut niveau d'excrétion, limité dans le temps, rendant le vêlage (ou l'avortement) une période à très haut risque sanitaire. La contamination verticale trans-placentaire est discutée. Les doses de salmonelles nécessaires pour infecter les bovins varient selon les voies de pénétration et l'âge des animaux. La voie orale est reconnue comme la voie d'infection la plus classique. Mais les contaminations aéroportées sont possibles, en particulier dans l'atmosphère confinée des élevages intensifs. Face à l'agression bactérienne, la réceptivité des sujets prend toute son importance pour déterminer l'évolution de l'infection. On reconnait des facteurs intrinsèques physiologiques (le jeune âge constitue la principale cause prédisposante), pathologiques (facteurs de stress, infection ou infestation intercurrente), immunologiques (la période de transition entre l'immunité passive d'origine colostrale et l'immunité active développée par le jeune veau est particulièrement délicate) et "iatrogènes" (action des antibiotiques). Parmi les facteurs extrinsèques, l'industrialisation de l'élevage du veau de boucherie est généralement incriminée et, chez les bovins adultes, la mise au pâturage favorise l'infection des animaux.
 
Gledel (J)
Les données très synthétiques qui sont présentées dans cet article sont à relier au contenu de l'article consacré aux "réservoirs" et à l'"environnement". La prophylaxie sanitaire de la salmonellose bovine vise à mettre en place, autour de troupeaux indemnes de Salmonella, des barrières suffisamment efficaces pour éviter le contact animal/Salmonella ou, à tout le moins, à des seuils non susceptibles de se révéler dangereux. C'est par la mise en œuvre d'un ensemble de mesures contraignantes, appliquées avec constance et rigueur, qu'un tel but peut être atteint (protection des animaux, hygiène de l'alimentation, hygiène générale concernant les locaux, les matériels, les personnels, etc.).
 
Morisse (J-P)
La mise en évidence de salmonelles par coproculture est relativement fréquente chez le jeune veau et elle ne présage pas obligatoirement d'une salmonellose clinique. La prévention sanitaire de la salmonellose doit être envisagée sous deux aspects complémentaires : 1. Contamination du veau 2. Conditions favorables au développement des salmonelles dans l'intestin et à l'extériorisation de leur pouvoir pathogène. Pour la contamination, les troupeaux laitiers guéris d’une salmonellose clinique représentent, au moment du vêlage, des foyers très actifs de dissémination des salmonelles. 60% des veaux étudiés sont porteurs de salmonelles. La contamination s’effectue par les fèces des mères, par le lait (des salmonelles sont isolées dans 35% des prélèvements) et vraisemblablement par le colostrum. Par ailleurs, pour les conditions favorables au développement des salmonelles, on trouve « la qualité du veau », caractérisée par le dysfonctionnement hépatique et la déshydratation, conséquences fréquentes d’un mauvais circuit d’approvisionnement jouant un rôle important dans l’apparition des salmonelloses cliniques, et d’autres paramètres : alimentation, habitat, hygiène, technicité. Toute perturbation digestive qu’elle qu’en soit l’origine : alimentaire, environnementale ou iatrogène, accroit le risque de prolifération d’une population potentiellement pathogène, normalement contrôlée par la flore de barrière. Différents exemples d’erreurs zootechniques typiques, pouvant être à l’origine d’un déséquilibre de la flore intestinale, sont donnés pour chacun des paramètres d’élevage.
 
Martel (J-L)
L'infection salmonellique des bovins ne peut être précisée que par le diagnostic expérimental. Le diagnostic de l'animal excréteur repose sur l'examen bactériologique. Les modalités du prélèvement sont discutées car elles déterminent la qualité des résultats des recherches bactériologiques ultérieures. Le milieu d'enrichissement recommandé pour les 2 sérotypes qui dominent la pathologie bovine est le bouillon sélénite F incubé 24, 48, voire 72 heures à 37°C ou à 42°C. Le choix du milieu sélectif repose plus sur l'expérience de l'utilisateur. Le problème des souches fermentant le lactose est soulevé. L'identification de S. Dublin et S. typhimurium est à la portée de chaque laboratoire de diagnostic vétérinaire qui doit assurer aussi la détermination de l'antibiogramme et adresser chaque souche au Centre National des salmonelles. Les résultats bactériologiques doivent être interprétés avec prudence. L'évaluation de l'état sanitaire du troupeau peut être abordée par des épreuves immunologiques. Si les tests intradermiques restent encore peu utilisés, le dépistage sérologique peut être réalisé au moyen de très nombreuses réactions sérologiques. Les réactions d'agglutination sont les plus utilisées mais un effort de standardisation des méthodes, utilisant des antigènes rigoureusement contrôlés, devrait permettre de définir des seuils de signification fiables chez les adultes. Ces méthodes sérologiques nous apparaissent trop défaillantes chez les veaux. Les mesures d'assainissement visant les animaux doivent être associées différemment selon que l'on veut protéger un effectif indemne ou que l'on met en place une stratégie offensive dans un foyer. L'hygiène du vêlage, période à hauts risques sanitaires, est à promouvoir en priorité. Le contrôle des animaux nouveaux entrant dans un troupeau représente le problème clé de la prophylaxie visant les animaux. Le bon choix des animaux constitue un élément fondamental de l'amélioration de l'élevage industriel du veau.
 
Pardon (P) & Marly (J)
La maîtrise du contact immunisant contre l'infection salmonellique passe par l'utilisation de vaccins. Seuls les vaccins inactivés sont actuellement autorisés en France. Des injections parentérales répétées des meilleurs vaccins inactivés actuels permettent d'obtenir une réduction de la létalité sans diminution réelle de la morbidité. Des chocs anaphylactiques ont été notés. Plusieurs souches vaccinales vivantes sont actuellement utilisées commercialement ou expérimentées chez l'Homme ou chez les bovins à l'étranger. Les protocoles allégés de vaccination utilisables avec les meilleures souches induisent une protection contre la létalité et la morbidité. Ces vaccins vivants sont peu coûteux de fabrication et d'emploi. Si des vaccins inactivés, des fractions bactériennes ou des immunogènes de synthèse avaient une efficacité et un coût comparables à ceux des vaccins vivants, l'éventualité d'une utilisation de vaccins vivants serait à exclure.
 
Lafont (J-P), Guillot (J-F) & Chaslus-Dangla (E)
Comme toute thérapeutique antibiotique, l'antibio-prévention des salmonelloses bovines a une cible bactérienne sur laquelle on attend un effet curatif, mais aussi des effets secondaires indésirables. La cible bactérienne est essentiellement représentée par les deux sérovars S. typhimurium et S. dublin, dont la plupart des souches sont actuellement porteuses de résistances plasmidiques multiples aux antibiotiques. Les connaissances dont on dispose sur la pathogénie et l'épidémiologie des salmonelloses bovines et sur la pharmacologie des antibiotiques semblent par ailleurs actuellement insuffisantes pour permettre de définir une stratégie cohérente d'antibio-prévention des salmonelloses chez les bovins. D'autre part, les effets secondaires indésirables de l'antibiothérapie, en particulier le risque de sélection de bactéries résistantes et la destruction des équilibres bactériens intestinaux, sont d'inévitables conséquences des distributions préventives d'antibiotiques. Les bovins représentent enfin un réservoir de salmonelles antibio-résistantes dont le rôle dans la contamination humaine par ces germes pathogènes à récemment été remis en lumière aux Etats-Unis. Il convient donc de considérer l'antibio-prévention des salmonelloses comme une mesure temporaire et aléatoire dont la mise en œuvre ne peut être systématique. Elle ne doit s'exercer qu'avec des molécules ne présentant pas le risque de permettre aux résistances plasmidiques de s'étendre. En particulier, les antibiotiques pour lesquels existe une résistance plasmidique encore minoritaire chez les salmonelles, tels que le triméthoprime (pour S. dublin), la gentamicine et l'apramycine (pour les deux sérovars) devraient être strictement réservés à l'usage curatif. La prévention efficace des salmonelloses bovines ne peut reposer que sur l'utilisation conjointe de méthodes hygiéniques et médicales, parmi lesquelles l'administration d'antibiotiques ne devrait jouer qu'un rôle mineur et occasionnel. Il semble impératif que de drastiques améliorations hygiéniques soient rapidement apportées dans ce but à la collecte, à la distribution et à l'élevage intensif du veau. L'importance des réseaux de surveillance de l'antibiorésistance bactérienne doit ici être soulignée.